Ousmane Alédji à propos du retour au Bénin des biens culturels : « Les Africains devraient arrêter de se laisser insulter »
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Très bientôt, le Bénin réceptionnera une partie de ses biens culturels emportés par les colons comme butins de guerre. Ainsi, sur demande du gouvernement béninois, le Président français a accepté le retour au Bénin de ces objets d’art. Tout grouille désormais dans les hautes instances diplomatiques pour la réception de ces objets de valeur inestimable. A travers cet entretien, Ousmane Alédji, l’un des acteurs culturels avertis du Bénin parle de l’importance du retour au Bénin de ces objets.
Bonjour M Alédji, l’année 2019 s’ouvre sur le social, si l’on en croit les propos du Président de la République. A quand le tour de la Culture qui est pourtant le socle du PAG. Pouvez-vous nous faire un bilan sommaire de l’année 2018 au plan culturel ?
Bonjour cher ami ! Il ne m’appartient pas, à moi de faire le bilan de l’année mais plutôt à vous, animateurs de la presse et des médias. Maintenant, pour le premier volet de votre question, je crois que le social intègre le culturel et le culturel, le social. Nous sommes sur le territoire humain. L’investissement dans l’humain est une notion homogène, globale ; ça part de l’éducation, entendue comme l’ensemble des informations et des formations qui construisent l’Homme, à son épanouissement. Je veux dire, pour faire court, que tout humain est par définition, une constellation de cultures, donc, un produit culturel. Qu’il soit riche ou pauvre, instruit ou non, en forme ou malade. Et, il est évident que les politiques sociales ont un impact sur l’Homme - créateur et consommateur d’arts et de cultures ; de la même façon que les politiques culturelles ont un impact sur l’Homme – acteur social - et par effet d’entraînement, sur son environnement et sa société.
Et en matière de réalisation des projets ?
La réalisation des projets phares du secteur du tourisme et des patrimoines est bien avancée. Le curseur s’oriente progressivement vers la culture. Je veux dire, de façon plus spécifique.
Que pensez-vous, M Alédji, de la décision prise par le Président Macron de restituer 26 objets culturels à notre pays ?
Je vous remercie pour la question. Pour moi, le fait culturel de l’année 2018, c’est incontestablement l’aboutissement de la demande béninoise. C’est un succès remarquable de notre diplomatie, conduite par le Ministre Agbénonci, sous l’autorité et l’implication active du chef de l’Etat lui-même. Cela mérite d’être fortement salué me semble-t-il. Au Bénin nous ne célébrons pas assez nos réussites. C’est mon avis.
M Alédji, pouvons-nous affirmer que la restitution des biens culturels au Bénin est une réalité ?
Absolument ! C’est du reste, un bon début.
Vous n’avez aucune appréhension ? M Alédji est-il satisfait ?
Difficile à dire. Je crois qu’on est encore dans la symbolique. Mais il ne s’agit pas de moi, moi, je ne suis pas facile à manœuvrer. Je suis quelqu’un un peu exigeant. Trop exigeant peut être. J’ai toujours une grande vision et je ne fais que des rêves surdimensionnés. C’est une faiblesse à laquelle j’essaie constamment de résister.
Autrement dit…
Le chemin qu’il nous reste à faire est considérable. Nous devons rester vigilants et au front. Tous. Je m’attendais par exemple à un peu plus d’enthousiasme que ça, au moins de la part de la presse béninoise. Par exemple. Je m’attendais à ce qu’une ONG ou encore que l’Assemblée Nationale salue cette réussite de la diplomatie béninoise par un communiqué. L’actualité est passée trop vite à mon avis. Nous ne savons pas célébrer nos réussites. Cela est très remarquable. Il faut qu’on y réfléchisse. Sérieusement.
Vous parlez de réussite… n’est-ce pas une question de perception ?
Pas du tout ! L’évidence s’impose à tous. Voyons... Est-il vrai que le gouvernement du Bénin a adressé une demande de restitution de nos biens culturels à l’Etat français ? Oui. Est-il vrai que la France a répondu favorablement à cette demande ? Oui. Est-il vrai enfin que 26 objets réclamés par le Bénin sont en route pour le Bénin ? Oui. C’est une réussite. Celui qui ne le reconnaît pas est de mauvaise foi. Tolérable mais grotesque !
Dites-nous, M Alédji, qu’est-ce qui a poussé le Président béninois à demander la restitution de ces objets ?
Son PAG (...) Cela s’appelle de la cohérence. Le développement du Bénin passe par la prise en charge et la dynamisation de son secteur touristique. Le Chef de l’Etat l’a martelé lors de la présentation du Programme d’Actions du Gouvernement (PAG). En réclamant le retour de notre patrimoine national, le chef de l’Etat a lancé l’exécution de son Pag. Je vais me répéter : cette demande du Bénin procède de la mise en œuvre du plus grand projet de développement culturel que nous ayons connu depuis 1960.
Il semble qu’à ses débuts en 1972, la Révolution aurait fait mieux.
Faux. Totalement faux ! Les discours révolutionnaires étaient, il est vrai, très culturel. Ils servaient ‘’à mobiliser les laborieuses masses populaires de nos villes et de nos campagnes’’. On s’inspirait à peine de Sékou Touré et de ce que faisait la Guinée. C’est tout. S’il y avait eu une véritable politique culturelle avant le renouveau démocratique, notre pays serait à un autre niveau de développement.
Revenons au sujet de notre entretien, si vous voulez bien M Alédji. Vous attendiez-vous à une réponse favorable à la demande béninoise ?
Du Président Macron, j’en ai déjà dit du bien, beaucoup trop. Je pense. Mais qu’à cela ne tienne. Quand il s’est engagé à Ouagadougou pour restituer les biens culturels de l’Afrique à l’Afrique, peu de gens l’ont cru en effet. Là, il vient de leur donner une preuve de sa détermination. En plus de son engagement politique, il a désormais des arguments scientifiques et historiques qui lui permettent d’aller au bout de sa promesse. Moi, je l’ai cru. Je ne crie pas victoire pour autant.
La restitution de ces objets est une bonne chose. Mais est-ce que les infrastructures existent pour accueillir ces objets afin de les conserver dans de bonnes conditions ?
Absolument ! Ce que nous n’avons pas encore, nous allons le construire. Ce qui n’est pas disponible sur le terrain, nous irons le chercher. Les compétences sont là qui chôment d’ailleurs ; certaines vont être renforcées au besoin.
Vous êtes très optimiste non, M. Alédji ?
Pourquoi dites-vous cela ? Et pourquoi pas ?
Croyez-vous vraiment que notre pays est prêt à relever ce défi ?
Je préfère ça.
Pardon ?
Je préfère quand vous posez la question en thème d’un défi à relever. Et je vous réponds que le Bénin, notre pays sera prêt. Le chef de l’Etat a suffisamment donné la preuve de sa détermination à révéler notre pays au monde. Ne nous mentons pas. Il y a un état des lieux pas très flatteur, connu de tous. S’il n’y avait pas ce vide infrastructurel que vous sous entendez, pourquoi allons-nous élaborer autant de projets. Plus de 1000 milliards de Francs d’investissement dans le secteur du tourisme et de la culture. Vous ne trouverez pas mieux en Afrique au sud du Sahara. Le Bénin ne le fait pas parce qu’il est riche, mais parce qu’il y croit. Si cela ne suffit pas à vous convaincre, que faut-il alors ?
Faut-il attendre l’arrivée de ces objets avant d’aller à la recherche de tout ce qui manque actuellement pour les conserver dans de bonnes conditions ?
Il faut du temps pour bâtir. Toutes les études sont terminées. Les différents marchés ont été déjà attribués. On attend que les plans architecturaux soient validés pour la phase active de la construction de ces infrastructures. Les premiers coups de pioches sont prévus pour le 1er trimestre 2019 à Abomey et à Ouidah pour commencer. Allada et Porto-Novo suivront. On n’a donc pas attendu l’arrivée de ces objets avant de construire. Si on avait attendu, ce serait maintenant qu’on penserait tous ces projets. Peu de Béninois savent que le chef de l’Etat a mis aussi en place un comité d’experts composé de personnalités du monde de la culture béninoise dont messieurs Tidjani Serpos, Alain Godonou... La mission de ce comité est de proposer au chef de l’Etat les mécanismes par lesquels cette restitution pourrait être facilitée. Tout est donc harmonisé. Si nous travaillons bien et que les bonnes énergies nous accompagnent, les Béninois seront fiers de voir que ce qui a été promis, a été réalisé.
Quelles sont les dispositions prises pour éviter que ces objets, une fois au Bénin, ne soient volés ou emportés par des incendies ?
Votre question sous-entend que dans les pays où ils sont indûment gardés, il n’y a pas de voleurs. Les incendies là-bas emportent parfois toute une ville. Vous avez entendu parler de l’incendie de Paradis au Etats Unis. Les vols dans ces pays sont des vols sophistiqués, technologiquement avancés. Moi, je ne me laisse insulter par personne. Et je réponds à tous les mépris. Les Africains ne devraient plus se laisser insulter.
Vous avez l’air choqué.
Je le suis. Vous avez répété des gens qui passent leur temps à nous insulter. L’Africain est un inconscient - l’Africain est incapable de ceci – incapable de cela. Quand vous laissez des gens qui vous ont volés vous dire qu’ils vous ont volés pour que vous ne vous fassiez pas voler entre vous… vous les laissez-vous insulter. Ils vous prennent pour des pieds. Il faut leur dire d’arrêter ça.
Il n’empêche que ce débat a sa raison d’être, M. Alédji.
Faux. C’est un faux débat. Croyez-moi. Il faut prendre le discours des petits snobes et des sceptiques pour ce qu’il est. Pas plus ! Contradictions ? Oui. Mais là, j’ai le sentiment qu’on fait le procès du gouvernement et de son chef sur un sujet qui devrait mobiliser chaque citoyen de ce pays. Moi, je suis sur ce front depuis plus de 20 ans. Je n’ai pas attendu le gouvernement. Pourquoi vous n’y êtes pas, vous, par exemple, vos collègues, tout Béninois lambda…
Vous n’espérez pas des applaudissements M Alédji ?
Pourquoi pas ? Quand c’est une bonne action et que c’est dans l’intérêt de notre pays… Pourquoi pas ? Ça a jamais tué qui d’applaudir le succès de l’autre ? Ça, c’est un problème ici.
L’esprit critique bien béninois, veut des garanties.
Vous me faites rire. Je l’entends très bien. Les garanties, l’Etat les a données. Mieux, nos interlocuteurs français nous ont pris au sérieux et ont répondu favorablement à notre requête. Mieux encore, le modèle béninois a inspiré d’autres pays africains et européens qui entament à leur tour un processus similaire au nôtre. De quelles garanties avons-nous encore besoin ?
Il n’y a donc aucune inquiétude à avoir quant à la conservation des objets ?
Mon cher ami, l’Europe, malgré son niveau de développement, est sujet aussi à des vols les plus inimaginables. Des gens cassent les choses là-bas aussi. Là-bas aussi, les gens laissent des choses se détériorer. L’Afrique n’a donc pas le monopole de l’incivisme et de la négligence. Nous travaillons tous à être meilleurs, eux comme nous ; chacun à son rythme, avec ses moyens. Et qu’on arrête de nous rabâcher les oreilles avec des insultes et des faux procès que l’on fait à l’Africain.
A quand le retour effectif des premiers objets sur la terre béninoise ?
Je ne peux pas vous le dire. J’imagine que le Président de la République fera une annonce solennelle le moment venu. Il y a un ensemble de mécanismes à mettre en place pour la réception de ces objets. Pour l’instant, tout ce qui se dit, se fait, se dit et se fait très bas. Il faut faire confiance à la diplomatie béninoise et à son chef ; à son efficacité dans la discrétion.
Comment se fera le transport de ces objets pour éviter qu’ils ne soient abîmés ?
On a des spécialistes pour ça. Il y a des gens qui ont consacré une bonne partie de leur vie et toutes leurs études pour savoir comment conserver ou comment transporter telle ou telle chose. Je vous le répète, il n’y a aucune crainte à avoir.
Ma question va encore vous choquer, M Alédji…
(Rires) Tant que vous le faites exprès, ce n’est pas grave.
Quel est l’intérêt pour le Bénin, pour le béninois lambda de voir ces objets revenir sur notre sol ?
Chaque objet a une valeur inestimable. Valeur artistique, valeur cultuelle et spirituelle, valeur historique et politique, valeur scientifique, valeur touristique. Bref ! Je répète, la réclamation de ces biens, marque le début de la mise en œuvre d’un vaste projet de développement, notamment, le PAG. Parce que derrière, il y a la construction de plusieurs infrastructures contemporaines, la formation des jeunes conservateurs et gestionnaires de patrimoines, le recrutement de plusieurs centaines de diplômés sans emplois qui réduira même modestement, le taux de chômage des jeunes. Ensuite, l’installation des objets dans des espaces modernes adaptés et l’élaboration de contenus culturels et scientifiques complémentaires en font des espaces de recherches pour nos jeunes étudiants. Ensuite, il faudra une programmation artistique pour rendre tous ces lieux dynamiques, lieux d’expressions artistiques donc. Ensuite, ouvrir ces lieux aux touristes… Tout ça génère une économie directe (les tickets d’entrée) et une économie indirecte (transports, hôtels, bars, restaurants, marchés). Bref : il y a une dynamique artistique, culturelle, économique, sociale et intellectuelle incommensurable. Des millions d’articles et des centaines de livres seront écrits sur ces objets et leurs environnements passés et actuels. Des milliers de reportages photos, de films documentaires. Nos images vont circuler partout. Cela accélère l’épanouissement et le mieux-être du Béninois. Ça n’a pas de prix tout ça. Voilà résumé pourquoi nous nous battons. Intérêt disiez-vous, il est incommensurable.
C’est heureux que ces objets nous soient restitués. Mais comment peut-on être rassuré qu’ils sont effectivement des originaux et non des copies ?
(Sourire) La France garde ces objets depuis plusieurs siècles. Elle ne s’est pas engagée à nous les rendre parce que nos Etats ont grossi des muscles et la menacent de je ne sais quelles diableries. Non. La France sait ce qu’elle a à faire. Son Président vient de nous donner la preuve de sa bonne foi. Nous n’avons pas à leur prêter ces intentions-là. C’est très déplacé. Je pense.
Le Président Macron s’est engagé à restituer 26 objets d’abord. Avez-vous une idée précise du nombre total d’objets à restituer ?
Les estimations varient. Il y a d’autres qui sont optimistes et qui vont au-delà de 7.000. Il y a d’autres qui sont un peu plus modestes et qui tournent autour de 5.000 à 5.500 objets. Il y a un travail d’inventaire à faire.
M Aledji, le code français n’a pas prévu la restitution des objets d’art rentrés dans le patrimoine français, la mission Savoy - Sarr a préconisé un dépôt à long terme avec bail renouvelable comme disposition juridique en attendant qu’un nouveau code ne soit voté par l’Assemblée nationale française. Que peut-on comprendre par dépôt à long terme avec bail renouvelable ?
Ce sont des mécanismes intermédiaires. En attendant de modifier la loi française. Mon avis c’est que, ce sont les Hommes qui font les lois et ces lois sont faites pour les Hommes. Donc, comme je le disais, la France sait ce qu’elle a à faire. Nous n’avons aucune leçon à leur donner. Le plus important c’est qu’on nous restitue ce qui nous appartient. C’est aussi simple que ça. Si nous avons quelque chose à faire, c’est d’anticiper sur l’élaboration de contenus complémentaires pour que ce ne soit pas seulement des objets revenus de la France qui soient exposés dans les musées.
Toutes ces démarches coûteront combien à l’Etat béninois ?
Difficile à dire. Tout coûte cher, même le pardon. Donc, au-delà de nos réticences et des bavardages malheureux, nous ne perdons rien à conduire ce projet jusqu’au bout. Rien, comparé à ce que notre pays y gagne.
Imaginons un instant que la loi française ne soit pas modifiée ou encore, que le président Macron ne soit plus au pouvoir, (l’actualité est caractérisée par l’apparition des gilets jaunes en France dont certains réclament sa démission), son successeur pourrait remettre en cause la décision de restituer les objets d’art au Bénin ?
Vous savez ce qu’on dit : avec des si on referait le monde. Il est vrai que nous devons aller vite. De toutes les façons, le temps joue contre nous. Notre population s’impatiente aussi. Cela suffit en soi comme pression.
Puisque le patrimoine du Bénin et des autres pays africains se trouvent un peu partout dans les pays européens, le Président Macron a décidé d’organiser dans le premier trimestre de 2019, une rencontre entre Africains et Européens afin de définir une nouvelle relation et politique d’échanges. Comment appréciez-vous cette démarche ?
Le Président Macron est un homme de vision. Normal qu’il essaie de changer les choses. Les personnages de ce genre, on peut ne pas être d’accord avec tout ce qu’ils font, mais ils sont intéressants.
Il a aussi dit qu’il accepte toute forme de circulation des objets d’art que ce soit par restitution, échanges, dépôts, ou exposition afin que la jeunesse africaine ait accès à son histoire sur son propre continent et non en Europe seulement. Approuvez-vous cette méthode ?
D’où le respect que le Président Macron m’inspire. Aucun d’entre nous n’a oublié son illustre prédécesseur qui a dit que les Africains ne sont jamais rentrés dans l’histoire. Avec le Président Macron, ça a commencé avec un clash puis ça s’est resserré. C’est différent. Non ? C’est heureux de constater qu’après l’engagement de Ouagadougou, les actes ont suivi.
Peut-on dire que la France est en train de vouloir développer une nouvelle politique diplomatique avec ses anciennes colonies ?
Les enjeux géostratégiques obligent toutes les puissances à se déployer. L’Allemagne qui était renfermée sur elle-même après la deuxième guerre mondiale, s’ouvre au monde et installe des instituts Goethe de plus en plus en Afrique. Même chose avec la Russie désormais en Centrafrique, l’Inde, la Chine… Nous avons même vu la 1ère ministre britannique danser au Kénya. Ce n’est ni anodin, ni gratuit. Toutes les puissances vont à la conquête des marchés nouveaux sans considération de pré-carrés. Si pendant ce temps, la France ne change pas sa politique, c’est elle qui va perdre du terrain. Elle le sait et elle sait ce qu’elle a à faire.
L’Afrique francophone a-t-elle une chance de mieux se porter avec cette nouvelle démarche du président Macron ?
Le sort de l’Afrique francophone n’est pas lié forcément à l’humeur d’un Président français. Cependant, parmi les interlocuteurs privilégiés de l’Afrique, il y a l’Etat français. Nous, africains, nous n’avons pas pour seule destination, la France. Le monde est très vaste. Les Russes sont en Centrafrique. Ils n’y vont pas pour faire du tourisme et ils ne vont pas s’en arrêter à la seule Centrafrique.
Est-ce que vous voulez dire que la françafrique est effectivement derrière nous, comme l’a annoncé le Président Macron.
Non. Je n’ai pas dit ça. Je dis qu’il ne dépend plus que de nous-mêmes de nous faire materner ou pas. A titre personnel, j’admets pour pacte sacré, irrémédiable et irréversible, mes rapports avec la langue française. A mes yeux, la langue française n’est pas qu’un outil dont on use pour le commerce, c’est aussi un ferment qui nous lie davantage à la France. Nos cultures sont apparentées puisque la langue irrigue l’ensemble de nos créations, jusqu’à nos racines. De la même façon que nous ne pouvons pas nous débarrasser de la langue française, de cette même façon nous ne pouvons pas nous débarrasser de la France. Et l’inverse est aussi vrai. C’est ce qui fait que les pays membres de l’ancienne Communauté Française d’Afrique ont pour partenaire prioritaire et privilégié, la France. Elle est considérée, avec raison, comme un parent très proche. Mais les désirs, les envies et les rêves de développement des Etats africains ne peuvent dépendre d’elle. Elle le sait et nous le savons aussi. A partir de ce moment, Françafrique ou pas, chacun fait ce qu’il a à faire. Normalement ! Normalement ! Je dis bien normalement.
Si vous avez un message à lancer aux dirigeants des pays de l’Afrique francophone, que diriez-vous ?
Je leur dirai de s’inspirer de l’exemple béninois. Le Chef de l’Etat et son ministre des affaires étrangères ont obtenu un résultat absolument remarquable.
Si vous le dites…
Je le dis parce que c’est vrai.
Un mot pour clore cet entretien.
Sur le sujet, je suis ravi d’entendre quelques opinions évoluer dans le bon sens. Ceux qui n’y croyaient pas, ont commencé déjà par y croire. Plus on avancera, plus on aura des gens convaincus que cette demande du Bénin procède du plus grand projet de développement de notre pays. Que Dieu nous garde en pleine forme tout au long de 2019.
Propos recueillis par Isac A. YAÏ
Cet entretien a été publié dans les colonnes du quotidien béninois "Fraternité" du 18-01-2019