Représentation théâtrale au centre culturel Artisttik Africa : "…La tragédie des corps dispersés" pour le repos des âmes des disparus"
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6 comédiens sur scènes. Sur un tapis rouge dans une salle en pleine rénovation du centre culturel Artisttik Africa, des comédiens venus du Bénin, du Burkina-Faso, de la France et du Togo présentent la pièce "Isis-Antigone ou la tragédie des corps dispersés". Cette pièce écrite par Kossi Efoui et mise en scène par Gaëtan Noussouglo et Marcel Djondo narre l’histoire personnelle des comédiens qui s’entremêle avec l’histoire globale de l’Afrique.
« La grande histoire vient croiser la petite histoire personnelle et individuelle des comédiens. C’est l’histoire d’une compagnie qui s’est disloquée il y a dix ans mais se reconstitue à nouveau pour continuer le travail. Donc, l’histoire personnelle des comédiens est mélangée à celle de l’Egypte et antique avec Isis, Osiris… et de la Grèce Antique avec Antigone… », précise Marcel Djondo, co-metteur en scène du spectacle.
Sur scène, les maîtres de la parole qui se retrouvent plusieurs années après, vont au-delà de leur propre histoire. Sur fond de dénonciation, ils ont peint plusieurs tableaux qui retracent la terreur et la tragédie qu’orchestrent certains affamés du pouvoir qui provoquent des milliers de morts et de disparus. Certains panafricanistes qui ont tenté d’éclairer leur peuple, sont assassinés et leur corps porté-disparus.
Des dirigeants sans visions pour leur jeunesse. Déboussolés et désespérés, certains jeunes s’entassent dans des barques de fortunes à la recherche du mieux-être en Occident. Malheureusement, des milliers parmi eux finissent leurs aventures au fond de la méditerranée ou au fond de l’océan Atlantique. « … Toutes ces situations ont comme point commun des corps disparus ou disloqués et qui n’ont pas de sépulture. Les âmes de ces corps ne sont pas apaisées parce qu’il leur manque cette sépulture. Cette situation agit aussi sur nous les humains dans notre société. Nous, comédiens, nous nous posons la question pour savoir ce qu’il faut faire pour apaiser ces âmes. Dans ce spectacle, il y a eu un semblant de réponse. Nous leur avons fait cette sépulture de façon symbolique puisque cela se fait dans nos sociétés. Nous avons donc fait des recherches dans différentes communautés pour savoir comment cela se passe… », explique Marcel Djondo.
Dans cette pièce où l’invisible agit sur le visible pour déterminer le comportement des vivants, le nœud du problème, reste et demeure l’apaisement des âmes des corps disparus… « Les personnages de Patrice Lumumba et Thomas Sankara sont évoqués dans cette scène, car ils étaient très importants dans la lutte panafricaniste. Ils ont été assassinés et leurs corps n’ont jamais été retrouvés. Entre temps, une dent de Patrice Lumumba a été retrouvée quelque par en Belgique et remise à sa famille. Quant à Thomas Sankara, la semaine dernière, il semble que des restes ont été retrouvés et enterrés contre l’avis de la famille. Ce sont des gens qui ont joué un rôle très important dans le panafricanisme mais dont l’âme n’a pas retrouvé de paix… », a indiqué le co-metteur en scène.
Ce spectacle présenté au Bénin, le sera bientôt au Togo, au Burkina-Faso puis en France avant de continuer son périple dans d’autres pays pour le repos des âmes des disparus.
Isac A. YAÏ
Article publié dans le quotidien Fraternité le 28 février 2023